Plessage
Un corridor écologique
Franck Viel (Association Passages à Avezé) recueille des savoir-faire auprès des anciens afin de les transmettre et de les adapter au contexte contemporain. Dans le cadre d’une rencontre du Club agroforestier sarthois, c’est la technique traditionnelle du plessage qui a été mise en avant. Une clôture naturelle aux multiples vertus.
Franck Viel (Association Passages à Avezé) recueille des savoir-faire auprès des anciens afin de les transmettre et de les adapter au contexte contemporain. Dans le cadre d’une rencontre du Club agroforestier sarthois, c’est la technique traditionnelle du plessage qui a été mise en avant. Une clôture naturelle aux multiples vertus.
Jadis, c’était une obligation pour ledit sieur bailleur…“ Inscrit dans les baux ruraux, le plessage ou plissage était effectué en même temps que l’étrognage des arbres têtards ou le curage des fossés. Massifiée avec l’avènement du bocage, son utilisation fut d’abord militaire avec des traces remontant à la guerre des Gaules”, rappelle Franck Viel, pilote passionné de cette journée de formation qui cite aussi bien son grand-père agriculteur de 94 ans que Pierre Desproges: “Avant le “démembrement” des années 60, ses intérêts étaient multiples: évacuer l’eau mais pas trop vite, retenir la terre dans les pentes et fournir du bois pour le chauffage ou la fabrication des outils.” Une clôture vivante qui faisait office de pharmacie avec la cueillette des plantes médicinales (aubépine, passiflore…).“ Le talus est sec et le fond humide, ce qui multiplie les milieux sur deux mètres. Strates végétales et systèmes racinaires sont stimulés. Le plessage est un demi-cépage qui régénère parfaitement une haie.” Un vrai corridor écologique dans lequel les essences fusionnent. Gîte et couvert pour une multitude d’oiseaux et de petits mammifères, “la haie offrait aussi un système vivrier aux paysans, poursuit Armelle Vinet, conseillère bocage de la Chambre d’agriculture du Maine-et-Loire. Il y avait beaucoup de greffages de fruitiers qui avaient l’avantage de ne pas empiéter sur les parcelles.”
Aussi utile qu’esthétique
3 Février 2023, c’est donc parti pour un plessage “revival” à Saint-Aubin-des-Coudrais! Le défi du jour: entailler les jeunes rameaux pour les plier et les entrelacer autour de piquets plantés à intervalles réguliers. La ferme “témoin” de cette première journée technique de l’année du Club agroforestier sarthois était idéale pour l’élaboration d’une haie plessée: une vingtaine de mètres linéaires jouxtant un remarquable peuplier et comptant un nombre important d’arbres têtards. A la tête de cette exploitation presque centenaire de 86 ha (dont 2 sur un bois), Jérôme Cléradin souhaitait parfaire une récente formation sur les trognes. “ Il y avait eu une partie tressage et je m’étais donc rapproché du Club agroforestier car j’avais envie de reconstituer des haies.” Un désir partagé par Mathias Schmitt, habitant de Saint-Marceau, qui souhaite mettre en valeur son terrain paysager: “J’ai une haie d’aubépine retournée à l'état sauvage de cent cinquante mètres. Je ne savais pas si je devais la couper à ras pour qu’elle recèpe ou la plesser. Je vais sans doute faire une bonne partie de plessage, autant pour le côté utile qu’esthétique. Car le rendu est très joli.” Et ne coûte pas bien cher par rapport à une clôture artificielle…
Le plessage
Etape 1
Les outils
Se munir d’une serpe, d’un sécateur de force ou d’une scie japonaise, d’une masse (ou d’une mailloche) qui servira à enfoncer les pieux (vivant déjà dans la haie ou achetés). Une tronçonneuse peut être utilisée pour les gros brins.
Etape 2
Nettoyer la haie
A l’aide d’un sécateur à manche et d’un croissant, éliminer nettoyer le bois mort, les ronces. Conserver les brins (les plus droits) qui seront plessés.
Etape 3
Coucher les brins
Entailler obliquement la base des brins à l’aide d’une serpe ou d’une tronçonneuse pour permettre leur pliage sans les rompre. Puis supprimer le talon (résidu de tronc) qui reste près de la souche. Les coucher ensuite à l’horizontale.
Etape 4
Planter les pieux et entrelacer les brins
A l’aide d’une masse, planter les pieux (type idéal: acacia) par coudée (tous les 40 cm). Exemple: 25 pieux pour dix mètres. Puis entrelacer les brins de part et d’autre des piquets.
Etape 5
La parure
Pour maintenir et solidariser les pieux, tresser le sommet de la haie avec des brins de bois mort.
Club agroforestier sarthois
“Quatre journées techniques par an”
Né en 2019 à l’initiative de la Chambre d’Agriculture, le club compte une quarantaine d’inscrits, agris comme particuliers. “Je suis à l’écoute de leurs envies, qu’elles soient utilitaires ou esthétiques, souligne Claire Lemarié, animatrice du groupe et conseillère bocage-agroforesterie à la Chambre. Puis on leur propose quatre journées techniques par an, une par saison, dont une avec un expert extérieur comme à St-Aubin-des-Coudrais. On y intègre également un volet sur la reconnaissance botanique. ”